Le Défenseur des droits, Jacques Toubon, exprime ses réserves sur le projet de loi relatif au renseignement
Date of article: 13/04/2015
Daily News of: 14/04/2015
Country: France
Author: National Ombudsman of France
Article language: fr
À l’occasion du début de l’examen par l’Assemblée nationale du projet de loi relatif au renseignement, le Défenseur des droits renouvelle ses réserves sur certains points majeurs du texte.
Entendu par la commission des Lois le 2 avril dernier, Jacques Toubon, tout en approuvant la démarche du gouvernement visant à élaborer un cadre légal pour les services de renseignement, avait souligné plusieurs insuffisances du texte de nature à porter atteinte aux droits et libertés fondamentales de l’ensemble des citoyens, en particulier leur droit au respect de la vie privée protégé par la Convention européenne des droits de l’homme et la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne :
- Le Défenseur des droits souhaite que le texte gagne en précision et en clarté pour répondre aux exigences de prévisibilité de la loi. Par exemple, il ne s’applique pas seulement aux actes de terrorisme mais également à des actes relevant de la criminalité et de la délinquance organisées. Il paraît indispensable que les motifs d’intérêt public pouvant justifier la mise en œuvre de technique de renseignement soient définis de manière précise et restrictive.
- Le Défenseur des droits déplore que le projet de loi ne contienne aucune précision sur les personnes qui pourraient faire l’objet de mesures de renseignement. Il souligne que ce dispositif est en contradiction avec la jurisprudence européenne qui impose à la loi de contenir des dispositions précises sur les catégories de personnes pouvant faire l’objet de mesures de renseignement, en particulier les membres de certaines professions (avocats, journalistes, parlementaires, magistrats …) qui doivent bénéficier d’une protection renforcée eu égard à leur activité.
- Le Défenseur des droits souhaite également que soit éclaircie dans le texte l’articulation entre la phase de collecte de renseignements à titre préventif et la procédure judiciaire qui pourrait être engagée sur la base des renseignements collectés, et qu’un contrôle soit effectué à cet égard.
- Le Défenseur des droits souhaite voir renforcer le contrôle des activités des services de renseignement, en particulier les modalités d’intervention, d’action et de recours de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR) dont la création est prévue par le projet de loi. Le contrôle de la CNCTR devrait être systématique et immédiat.
- Le Défenseur des droits approuve dans son principe l’intervention d’un contrôle juridictionnel confié au Conseil d’Etat mais souhaite que le texte garantisse que ce recours soit ouvert à tout justiciable soupçonnant d’être surveillé, que le contrôle soit effectif et qu’il présente davantage de garanties en matière d’équité du procès.